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3. Marchés et comportements

Pour l’instant on a parlé de flux de bien et de monnaie sans parler de valeur ou de prix. Nous allons donc maintenant nous pencher sur la question des marchés, de leur fonctionnement et de la formation des prix.

Même si on ne s’intéresse qu’aux flux, la valeur monétaire associée est intéressante, puisque c’est ce qui permet d’additionner les différents produits. Pour mesurer la production, par exemple, et rendre comparable la production de voitures et de tomates, on va multiplier ces biens par leurs prix, ce qui donne leur valeur, avant de les additionner, de comparer leur poids dans la consommation ou de faire toute autre mesure.

Les marchés apparaissent à divers niveaux dans le circuit (marché des biens, du travail, marché financier pour le capital…). Après un bref rappel théorique nous allons détailler ces différents marchés.


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3.1 La théorie

Un marché est un lieu de rencontre des offres et des demandes de biens et de services sur lequel va s’établir un prix. Un prix est associé à chaque bien. C’est la quantité de monnaie que l’on doit donner pour avoir une unité de ce bien. Pour chaque produit il y a un marché. De nombreux marchés peuvent être rassemblés à certains endroits, comme par exemple dans une échoppe sur une place du marché (on trouve de nombreux produits qui sont chacun associés à un marché dans une épicerie qui vendrait à la fois des tomates, sur le marché de la tomate, des pots de moutarde, sur le marché des pots de moutarde), ou être spécialisés comme dans le cas de la vente d’automobile (on ne trouve que des automobiles chez un concessionnaire).

La théorie que nous évoquons est la théorie néoclassique.

Il y a des offreurs (vendeurs) et des demandeurs (acheteurs) qui se portent sur un marché sur lequel un prix détermine la valeur d’une unité échangée. Le marché permet la coordination entre les offreurs et les demandeurs. Les acteurs ont une offre ou une demande qui dépend du prix. La demande est la quantité de bien qu’un acheteur désirera acheter pour un prix donné. Cette demande décroît quand les prix augmentent : plus c’est cher moins on achète. L’offre augmente avec les prix : plus c’est cher plus on vend. Il existe un prix d’équilibre qui est tel que l’offre est égale à la demande. La théorie stipule que le prix se fixe à ce niveau, de telle sorte que l’offre est égale à la demande, si il n’y a pas de contrainte au fonctionnement du marché.

Comment cela se passe-t-il ? On peut en donner une idée. Supposons par exemple que la demande est supérieure à l’offre. Cela correspond à un prix faible. Dans ce cas les demandeurs qui ne pourraient pas acheter le bien sont prêts à le payer plus cher. Symétriquement les offreurs veulent bien mettre plus de biens sur le marché si les prix augmentent. Un nouveau prix plus élevé va donc émerger, les offreurs pouvant profiter d’un prix plus élevé puisque de nombreux acheteurs sont prêts à payer ce prix. Et ainsi de suite jusqu’au prix d’équilibre.

La demande, ou l’offre, dépend également du revenu de l’agent concerné. Plus le revenu est élevé, plus la demande est importante. Symétriquement, plus le revenu est faible plus on est prêt à accepter un prix bas tant que l’on peut vendre.

Il y a plusieurs marchés simultanés et les revenus des agents acheteurs dépendent des prix sur les autres marchés où ils sont vendeurs. Par exemple les revenus des ménages proviennent des salaires et ils achètent des biens tandis que pour les entreprises c’est l’inverse. Ce qui importe donc est l’équilibre général, l’équilibre simultané sur tous les marchés.

Les marchés sont distingués en fonction du nombre d’offreurs ou de demandeurs. Plus le nombre est petit plus il leur est possible d’influencer les prix (à la hausse pour les offreurs). Ils n’ont pas non plus intérêt à trop augmenter sinon plus personne ne veut acheter.

En fonction du nombre de vendeurs et d’acheteurs on distingue ainsi :

Pour tous les échanges que nous avons vus il y a un marché et un prix :

Cet équilibre sur tous les marchés n’est pas obtenu dans la réalité, qui correspond plutôt à une situation de déséquilibre permanent. De plus ces marchés ne fonctionnent pas vraiment comme la théorie le prédit et nous allons nous intéresser de plus près à leur fonctionnement.


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3.2 Les marchés de biens

Certains biens sont vendus sur des marchés bien décrits par la théorie, comme par exemple les marchés sur lesquels on va faire son marché. Pour certains produits manufacturés en particulier entre entreprises ce modèle reste pertinent.

Par contre de nombreux produits manufacturés ne rentrent pas vraiment dans ce cadre. En effet, les dépenses de publicité entrent pour une grande partie dans le prix des biens et ont pour conséquence une augmentation de la demande. Il y a tout un jeu autour de la publicité, de réputation. Dans le modèle théorique, les entreprises répondent à la demande des consommateurs. Avec la publicité les entreprises peuvent créer de la demande qui n’existait pas auparavant, créer des besoins. C’est la filière inverse.

En outre une caractéristique des modèles néoclassiques est l’absence de rendements d’échelles croissants. Il y a des rendements d’échelle croissants si, lorsque l’on augmente dans une même proportion la quantité de chaque bien utilisé pour la production, la quantité produite augmente plus que proportionnellement. Or pour de nombreux produits c’est justement le cas, plus la production est importante, moins les coûts par unité produite sont élevés.


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3.2.1 La concurrence monopolistique

La conséquence des économies d’échelle est la concentration des entreprises. En effet, lorsque les entreprises fusionnent, elles peuvent fabriquer la même quantité à moindre coût. Un bien donné n’est fabriqueé que par une seule entreprise afin de profiter au maximum des économies d’échelles. Ceci n’exclut pas une certaine forme de concurrence puisque d’autres entreprises vont produire des biens similaires. Les entreprises ne se font plus concurrence sur un seul marché, mais se font concurrence produit par produit. Ce type de concurrence s’appelle la concurrence monopolistique.

Dans ce cadre nombre de produits sont fabriqués par un unique producteur ou un faible nombre de producteurs et revendus par de nombreuses marques qui se font concurrence sur la distribution de produits similaires. C’est le cas pour les parfums, qui sont produits par 3 firmes de chimie et vendus par de nombreuses maisons de haute couture et de mode.


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3.2.2 L’indice des prix

Afin de mesurer la variation des prix de manière globale un indice des prix est construit. Pour cela :

  1. Un certain nombre de produits sont sélectionnés, c’est le prix de ces produits que l’on va suivre. C’est relativement délicat étant donné que les produits évoluent, certains disparaissent tandis que d’autres sont remplacés.
  2. Ensuite on construit un indice des prix qui va permettre de mesurer la variation des prix. Pour cela on divise la valeur des biens évalués au nouveau prix par la valeur de ces mêmes biens évalués à l’ancien prix.

A partir de cet indice mesurant la variation des prix, il est possible de prendre en compte la variation des prix dans l’évolution de divers autres indicateurs. La valeur utilisée sans prendre en compte la variation des prix s’appelle une valeur nominale, tandis qu’elle est dite réelle lorsque la variation des prix est prise en compte.

Par exemple, on parle de variation du salaire nominal lorsque l’on ne s’intéresse qu’au salaire libellé en euro. La variation est mesurée par le taux de variation qui est le rapport du nouveau salaire sur l’ancien salaire. Cependant on a aussi une variation des prix. Pour savoir comment évolue les salaires en prenant en compte l’évolution des prix, on divise par l’indice des prix et on obtient la variation réelle.

L’inflation correspond à une hausse des prix, la déflation à une baisse des prix.


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3.3 Le marché du travail

C’est un marché très encadré. Il y a un prix minimum, le SMIC (Salaire Minimum Interprofessionnel de Croissance) et un rationnement de la demande de travail : les entreprise aimeraient embaucher plus mais à un salaire plus faible, il y a du chômage. Les syndicats (de salariés et du patronat) et l’Etat jouent un rôle important dans les négociations salariales. C’est de moins en moins vrai, car les salaires sont de plus en plus individualisés. Le temps de travail est également réglementé.


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3.4 L’investissement

Il s’agit de l’investissement en capital physique, permettant de produire et décidé par les entreprises et non pas des placements financiers.

Cet investissement peut concerner du capital matériel et immatériel. L’investissement matériel correspond aux machines, outils, bâtiments ou véhicules tandis que l’investissement immatériel correspond aux brevets et logiciels.

La demande est particulière. En effet ce sont les bénéfices espérés qui importent, comparés au taux d’intérêt. En effet, plus le taux d’intérêt est élevé plus le coût d’un emprunt est élevé et plus il est rentable de placer sur les marchés financiers.

Les bénéfices espérés à leur tour dépendent de nombreux facteurs tels la demande anticipée, les baisses de coûts permises par l’investissement, les comportements des concurrents. Ceci conduit à un marché assez volatil et à des cycles sur les stocks d’invendus.


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3.5 Les marchés du crédit et la création monétaire


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3.5.1 La monnaie

La monnaie a 3 rôles.

  1. C’est un moyen de paiement universel, elle permet d’éviter d’avoir à trouver celui qui possède ce que l’on veut ainsi que ce qu’il veut, et donc permet d’éviter le troc.
  2. C’est un étalon de valeur permettant de mesurer tous les autres biens (c’est ce qui permet d’ailleurs d’en faire un intermédiaire d’échanges).
  3. C’est également une réserve de valeur étant donné qu’elle peut s’échanger contre toute autre marchandise. Ce rôle de réserve de valeur peut se manifester lorsque les agents considèrent que les autres placements ne rapportent pas assez, ou que leur prix va chuter.

Elle se présente sous forme de monnaie fiduciaire (billets, pièces) et de monnaie scripturale (dépôts dans les banques, compte chèques).

De plus certains placements qui ne sont pas strictement de la monnaie, mais qui peuvent être convertis en monnaie sont considérés comme de la monnaie. Ainsi les placements rémunérés mais qui peuvent être récupérés sans vente d’actifs (on perd uniquement les intérêts) tels les placements à la caisse d’épargne, et également les OPCVM qui sont des placements boursiers sans risque important puisque réparti sur de nombreux titres sont considérés comme de la monnaie.

La monnaie va servir d’intermédiaire dans les échanges et va également permettre de transférer du revenu depuis les agents ayant une capacité de financement vers ceux qui ont un besoin de financement. On remarque cependant que la quantité de monnaie est plus importante que ce qu’il serait nécessaire pour permettre ces achats et financements. La monnaie circule en effet entre les agents quand ils s’achètent et se revendent entre eux les biens et titres. En raison de ces mouvements la masse monétaire est nettement plus élevée que ce qu’il apparaît dans le circuit.

Dans la théorie (néoclassique), lorsque l’on fait un prêt on renonce à un achat présent pour un achat futur. Le taux d’intérêt rémunère la patience. Pour d’autres auteurs (les keynésiens) c’est le prix du renoncement à la liquidité : on ne peut plus acheter d’autres biens en particulier profiter des hausses ou baisses de prix si l’argent est placé.


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3.5.2 Le marché de court terme et la création monétaire

D’où vient cette monnaie ? Elle provient essentiellement des crédits accordés aux entreprises, des crédits de très court terme, moins de trois mois. Il ne s’agit donc pas de crédits à la consommation ni de crédits demandés par les entreprises pour des investissements.

Pour cela les entreprises viennent avec des effets de commerce c’est-à-dire des documents montrant qu’elle a fait une avance à une autre entreprise. De cette façon la monnaie n’est créée que si il y a une production déjà effectuée. La monnaie n’est réellement créée que si il y a plus de nouveaux emprunts que d’emprunts qui viennent à terme. Cet argent est dépensé par les entreprises et va ensuite alimenter tout le circuit.


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3.5.3 Le crédit de long terme

Il est financé par des ressources stables, soit d’autres emprunts de long terme, soit des ressources propres des sociétés financières ou encore à partir d’une grande masse de dépôts.

Lorsque les dépôts financent les prêts, les banques profitent du fait que tous les clients ne vont pas rechercher leur argent en même temps. Cela permet de transformer des créances de court terme (les dépôts) en prêts de long terme.

Le marché du crédit est très imparfait. Etant donné qu’il y a un risque de non remboursement il faut des garanties solides pour obtenir un prêt. Et ce d’autant plus que l’emprunteur en sait plus que la banque sur ses capacités à rembourser. On ne prête qu’aux riches. C’est un facteur important d’inégalités.

En cas de problèmes économiques importants, il peut également se révéler instable : si les acteurs perdent confiance dans le système ils peuvent tous se mettre à vouloir récupérer leur argent. Si il est engagé dans des opérations de plus long terme les banques ne pourront pas le faire ce qui conduira à une faillite généralisé du système bancaire, de plus en plus de banques ne pouvant satisfaire leurs obligations.


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3.6 Les marchés financiers

Ces marchés correspondent à l’épargne directe, ils permettent aux épargnant de mettre leur fonds à disposition des agents ayant besoin de se financer, sans passer par un intermédiaire.

Une première remarque est que les taux ne sont pas du tout déconnectés des taux du crédit, pour un risque équivalent la valeur des titres va varier de tel sorte que les rendements soient similaires.

Si on suppose par exemple que l’on a une obligation qui est émise lorsque le taux d’intérêt est de 10%, et qu’elle vaut 100 euros, elle rapportera 10 euros : pas moins, sinon personne ne va l’acheter, un prêt sur le marché du crédit rapportant plus. Pas plus que 10 euros, sinon l’entreprise qui l’émet y perd. Supposons qu’ensuite le taux du marché monétaire baisse à 5%. Dans ce cas il sera possible de revendre cette obligation 200 euros, étant donné qu’à ce prix là le rendement est le même que sur le marché monétaire, car elle rapporte toujours 10 euros.

Normalement les valeurs des titres devraient refléter la valeur des entreprises, en prenant en compte les revenus futurs. La valeur des entreprises étant entendue comme la capacité à distribuer un revenu élevé. Cependant on remarque que le nombre d’échanges est très important par rapport aux évolutions réelles de la conjoncture des entreprises, et que les variations de valeur ne suivent pas du tout ce qu’on appelle les fondamentaux qui sont des indicateurs de la valeur des firmes.

Ce sont les anticipations sur les prix des actifs qui vont jouer un rôle majeur, les acteurs vont spéculer sur le marché. Il ne s’agit pas de se porter acquéreur de titres si on pense que ce titre va rapporter parce que l’entreprise qui l’a émis est en bonne santé, mais de l’acheter si on pense que les autres vont en faire autant, car dans ce cas son prix va monter.

Le résultat c’est la formation de bulles spéculatives : quand une valeur commence à monter, les agents peuvent penser qu’ils vont risquer de perdre une occasion d’acheter des titres qui montent, et donc vont se porter également acheteurs ce qui va faire encore grimper le prix du titre. Lorsque les anticipations se retournent le même phénomène se reproduit à la baisse.

Ces phénomènes induisent une instabilité des marchés financiers importante qui peut résulter en krach retentissant, une perte de confiance généralisée menant à une baisse de toutes les valeurs et une perte de patrimoine pour un grand nombre d’agents. Bien entendu certains profitent de ces mouvements (ceux qui ont acheté quand les prix étaient bas et vendus quand ils étaient au plus haut).

Il est possible de se prémunir contre les risques en achetant des produits dont la valeur varie en sens inverse du titre que l’on désire.


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3.7 Change et marchés de devises

Il faut passer par ce marché lorsque l’on investit, vend, ou encore achète à l’étranger. En effet les placements dans un pays se font dans la monnaie de ce pays. Les achats dans un pays se font dans la monnaie de ce pays. On appelle balance des paiements le solde des mouvements de monnaie vers l’extérieur. Si on vend plus que l’on achète à l’étranger ce solde sera positif. De la même façon, si des investissements étrangers sont faits en plus grand nombre dans le pays que les résidents du pays n’en font à l’étranger, ce solde sera positif. Les mouvements des revenus du capital ou du travail jouent également un rôle dans le solde. Enfin les capitaux à court terme qui vont et viennent en fonction des taux d’intérêt vont également jouer dans la balance.

Les changes aujourd’hui sont flexibles. Cela veut dire que le taux de change est fixé sur le marché des changes. Ce marché est très spéculatif, et les taux de change peuvent varier très rapidement. Ainsi, en un an le taux de change euro/dollar (le nombre de dollars achetés pour un euro vendu) est passé d’environ 1 pour 1 en janvier 2003 à 1 pour 1,28 en janvier 2004. C’est une augmentation très importante.


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