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7. L’intégration européenne


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7.1 L’intégration des marchés

Des obstacles institutionnels peuvent exister entravant le commerce entre pays. Ces obstacles aux échanges sont :

L’intégration Européenne est encore essentiellement économique. Historiquement, il y a d’abord eu une levée des obstacles tarifaires, c’est-à-dire des taxes sur les produits importés. Ensuite il y a eu l’établissement d’un tarif douanier commun. Enfin il y a eu le marché commun qui a permis l’élimination des barrières non tarifaires entre pays de l’Union Europénne (UE).

L’objectif d’une libéralisation des échanges est d’avoir une baisse des prix pour les consommateurs, et une augmentation des débouchés et des profits pour les entreprises étrangères qui peuvent exporter davantage. Ceci se fait bien entendu au détriment des entreprises intérieures, mais le gain global est toujours plus important que la perte. Cependant certaines catégories peuvent être touchées de façon importante et les effets redistributifs peuvent être importants. Par exemple nous importons le matériel HiFI des pays d’Asie du Sud-Est, ce qui permet d’avoir ce matériel à bas prix et nous exportons des avions que les pays d’Asie du Sud-Est ne savent pas fabriquer. Cependant la libéralisation ne va pas de soi, car celui qui libéralise de son côté perd si les autres gardent des protections.

Si la concurrence est de type concurrence monopolistique alors l’effet d’une libéralisation est potentiellement encore plus bénéfique en raison des économies d’échelle, en effet une augmentation de la taille du marché, permet un spécialisation plus poussée. Dans ce cas on peut avoir un échange de produits similaires, intra-branche. Par exemple en Europe la France et l’Allemagne se vendent des voitures, mais la France est spécialisée dans les petites voitures pas trop chères, tandis que l’Allemagne fait des voitures plus chères. Cette spécialisation se fait au niveau des produits finis, mais il peut également y avoir spécialisation au niveau des produits intermédiaires. Par exemple l’Airbus est monté en France mais les pièces viennent de nombreux pays européens.

Cela ne diminue pas forcément les tensions commerciales, au contraire. En effet, dans ce cas celui qui atteint la taille critique a toutes les chances de rester le seul en course pour ce type de produit. Par exemple il est possible qu’il n’y ait de place, dans le monde que pour une seule silicon valley. Dans ce cas ce seront uniquement les Etats Unis qui produiront des processeurs. Dans cet ordre d’idée il peut être intéressant pour les pays de protéger leurs industries naissantes. C’est ce qui s’et passé avec Airbus qui était protégé dans un premier temps des constructeurs américains, en particulier de Boeing, sans cette protection il n’aurait pas pu faire face à la concurrence.

Dans tous les cas un changement de spécialisation, même s’il est bénéfique à long terme peut être dommageable à court terme. En effet il faut que le capital se réoriente, que les salariés acquièrent de nouvelles connaissances, et enfin que les infrastructures s’adaptent.

Dans le cas de l’Europe il ne s’agit pas d’une libéralisation complète mais de la formation d’un bloc commercial. Dans ce cas, il y a des risques de ce que l’on appelle un détournement de commerce, que les pays de l’UE commercent avec des pays de l’Union moins efficace que les pays étrangers. Par exemple la Hongrie et la Chine font de l’électronique, et il est possible qu’après l’intégration de la Hongrie dans l’UE le commerce se fasse plus encore avec la Hongrie, même pour des biens pour lesquels la Chine est plus efficace. Cependant, moins les pays sont fermés et plus les pays commercent déjà entre eux, moins il y a de chance d’un détournement de commerce. Dans le cas de l’UE les pays sont ouverts et s’intègrent avec leurs voisins, le détournement de commerce est négligeable.

En fait, ces questions étaient d’actualité au moment de la constitution de la CEE. Le monde était relativement protégé. Il y avait une autre organisation de libre échange, l’AELE (Association Européenne de Libre-Echange) en Europe et tous les pays de l’AELE ont adhéré à l’UE (à part la Suisse et la Norvège) pour profiter du marché intérieur. Et le commerce intra européen a sans doute été bénéfique à la croissance. Cependant, parallèlement une libéralisation globale a eu lieu, sous l’égide du GATT et les pays sont très ouverts aujourd’hui, avec l’exception du textile et de l’agriculture. Pour ce qui concerne le textile l’accord multifibre qui protégeait les pays européens est en passe d’être abandonné. Au niveau de l’agriculture il y a encore des subventions à l’exportation, nous y reviendrons plus loin. Il reste néanmoins que les barrières non tarifaires peuvent être importantes.


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7.2 La monnaie unique

Une nouvelle étape dans l’intégration européenne a été franchie avec la monnaie unique. Désormais, pour la zone Euro qui ne recoupe pas totalement l’UE, étant donné que le Danemark, la suède et le RU ne sont pas dedans, il y a une monnaie unique émise par la Banque Centrale Européenne (BCE) qui est indépendante du pouvoir politique. Il y a donc également un taux d’intérêt monétaire qui est le même pour tous les pays de la zone.

La monnaie unique apporte des avantages et des inconvénients. Au niveau des avantages, on trouve la suppression du risque de change qui diminue les coûts de transaction. Lorsque les risques de change existent, il faut payer une prime de risque qui augmente artificiellement les coûts et pénalise en particulier l’investissement. La suppression du change elle-même entraîne quelques économies. Les possibilités de comparaison des prix peuvent également permettre une baisse des prix et des rentes des monopoles, une meilleure concurrence.

Etant donné que le taux d’intérêt est le même pour tous les pays, la monnaie unique conduit également à une synchronisation des cycles plus importante.

Une monnaie unique permet également d’être à l’abris de la spéculation. En 1993, les monnaies européennes avaient du accepter de ne plus avoir de changes fixes en raison de la position des spéculateurs sur les marchés qui pensaient que certaines monnaies étaient surévaluées. Ces spéculateurs vendaient des lires contre des marks et les banques centrales ont du renoncer à lutter contre ce mouvement (en vendant des marks et en achetant des lires).

Par contre l’absence d’indépendance des politiques de change et de taux d’intérêt peuvent être problématique si la zone n’est pas homogène, les cycles ne sont pas corrélés et il n’existe pas de moyen d’exporter les chocs dans les pays voisins. Que se passe-t-il si les cycles ne sont pas corrélés ? Dans ce cas une partie de la zone sera en récession tandis que l’autre partie sera en expansion. Jouer sur les parités des monnaies et les taux (dévaluer dans les régions en crise) permet d’empècher la crise et l’inflation. Dans une union monétaire, ce n’est pas le cas. Si les salariés et le capital est mobile, ou si il y a des compensations budgétaires entre régions il est également possible de compenser les régions en crise par les régions en expansion. Ce n’est pas le cas en Europe, étant donné la faible mobilité du travail et budget réduit. Ainsi en 2003 l’Irlande et l’Espagne sont en surchauffe tandis que l’Allemagne et la France sont en récession forte, il faudrait des taux très faibles dans ces pays en crise et des taux plus élevés dans les pays en surchauffe, ce n’est pas possible.

Une Union monétaire devrait également impliquer une plus grande coordination. D’abord sur le plan budgétaire, car les variations du solde budgétaire impliquent des pressions sur les taux d’intérêt qui sont les mêmes pour tous les pays de la zone. Elles impliquent aussi des tensions inflationnistes qui ont également une influence sur les partenaires. Il faut donc une coordination. C’est l’objet du pacte de stabilité du traité de Maastricht qui impose des conditions sur les déficits publics et des pénalités en cas de dépassement.

Ensuite sur le plan fiscal. Les entreprises, dans une moindre mesure les personnes, mais surtout les établissement bancaires vont avoir intérêt à aller dans les pays qui ont la fiscalité la plus avantageuse. Ceci pose deux problèmes. D’une part, les Etats peuvent se faire une concurrence fiscale, ce qui pose de graves problèmes sociaux, et d’autre part les décisions économiques, biaisées par la fiscalité ne vont pas être efficaces. On est très loin de cette uniformisation étant donné les différences entre les systèmes, qui sont bien plus que des différences techniques, mais qui correspondent à des visions politiques différentes.


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7.3 La politique économique Européenne

Outre son intervention économique directe, l’Europe définit également des normes, en particulier environnementales, et des labels. Elle agit aussi au niveau de la non discrimination, ce qui peut avoir des conséquences économiques, en particulier sur la discrimination homme/femme qui est importante en France : les femmes sont incitées à l’inactivité lorsqu’elles ont des enfants tandis qu’elles sont discriminées dans le monde du travail.


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7.3.1 Une politique de rigueur

La politique économique européenne est plutôt une politique libérale monétariste. L’aspect monétariste concerne essentiellement la BCE. Ainsi le seul objectif de la BCE est la lutte contre l’inflation ce qui a pour conséquence la fixation de taux plutôt élevés et un politique de l’euro plutôt fort. En ce moment les taux sont tout de même relativement bas, mais pas assez pour relancer l’économie des pays en crise (Allemagne, France), ce qui contraste avec l’attitude de la Fed (la banque centrale américaine) qui a baissé les taux pour soutenir l’activité aux Etats Unis, ce qui a réussi. La BCE n’effectue pas de relances monétaires, et ne se préoccupe pas du chômage. L’objectif de cette stratégie est de donner des signaux cohérents aux marchés financiers, d’avoir une crédibilité suffisamment forte afin que la spéculation ne soit pas possible et que la stabilité de l’économie soit la plus grande possible.

Au niveau budgétaire les recommandations sont d’éviter les déficits publics le plus possible, en particulier de ne pas faire de relance budgétaire et laisser uniquement les stabilisateurs jouer. Dans le même temps, les impôts doivent être diminués si possible. Les dépenses d’infrastructure, d’éducation et de recherche sont plutôt encouragées.

Au niveau du marché du travail, les recommandations sont d’encourager la baisse des salaires des travailleurs peu qualifiés, d’éviter les dépenses passives, essentiellement l’assurance chômage, d’augmenter la population active.


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7.3.2 Mais une conjoncture peu favorable

L’année dernière la conjoncture a été très mauvaise pour la France et l’Allemagne. Dans ces conditions ces pays n’ont pas pu respecter les critères de Maastricht, et ont tenté des relances budgétaires. Dans le cas de la France, en 2003, il y a eu une baisse de l’impôt sur le revenu et une augmentation des dépenses relatives à la sécurité (police, défense en particulier). Cependant cette relance reste modérée, car il y a eu une moindre augmentation dans les secteurs de la recherche, de l’enseignement, et de la culture et une augmentation d’autres impôts (sur le tabac et impôts locaux). Il n’y a pas eu de pénalités, ce qui était relativement prévisible, d’autant qu’il n’y a pas eu non plus de dérapage, car c’est la conjoncture qui est la principale responsable. Ce précédent met cependant à mal le pacte de stabilité et de ce fait la crédibilité de la zone euro.

Etant donné la conjoncture, la BCE est critiquée pour sa politique de rigueur, d’autant plus que la Fed a permis une relance importante aux Etats Unis, dont l’Europe profite peu en raison de la dévaluation du dollar. Les perspectives sont néanmoins un peu meilleures cette année mais pas non plus terribles.


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7.4 L’élargissement de l’Union Européenne

L’élargissement de l’Union Européenne est un enjeu important. Le poids économique de ces pays, les Pays d’Europe Centrale et Orientale (PECO) n’est pas très important ni leur poids démographique (à l’exception de la Pologne). Cependant, l’élargissement concerne 8 pays qui sont, d’une part plus pauvres que les pays de l’UE, et d’autre part dans une situation particulière car en transistion d’une économie planifiée vers une économie de marché. (Chypre et Malte entrent aussi dans l’UE, mais je n’en parlerai pas).

La transistion est liée à un chômage encore important, un déficit budgétaire associé, une inflation importante et le développement d’une économie parallèlle. Cependant la majeure partie de la transition a déjà été effectuée, le niveau de production pré transition a été largement dépassé, les taux de croissance sont importants.

Dans ce temps, l’augmentation des exportations, des importations vers l’UE et les investissements venant de l’UE ont été très importants. En fait les barrières tarifaires autres qu’agricoles sont peu importantes depuis 1991, et les PECO sont ouverts au capital européen. Les conséquences sont doubles : d’une part les ajustements liés à l’élargissement vont être faibles et d’autre part les gains de l’élargissement ne vont pas être non plus très importants.

Il reste des gains à attendre pour les PECO, en particulier en terme de confiance des investisseurs, de fin de monopoles, mais également de la fin des dernières barrières non tarifaires. Et également des coûts liés en particulier à la mise en conformité par rapport aux normes environnementales.

Pour l’UE, le problème proviendrait plutôt de l’acceptation des transferts qui vont avoir lieu vers les PECO. En effet, les deux postes importants des dépenses de l’UE sont destinés, l’un aux pays agricoles, dans le cadre de la PAC (Politique Agricole Communne), et l’autre, les fonds structurels, aux pays ou régions en retard ou en difficulté. Les PECO qui sont très agricoles et ont un revenu moins élevé que les pays de l’UE vont bénéficier de façon importante de ces transferts.

La PAC posait des problèmes importants étant donné que les pays de l’UE ne voulaient pas alourdir un dispositif déjà couteux et peu efficace, ni subventionner une agriculture par trop inefficace. La PAC comporte un mécanisme de soutien des prix avec des prix intérieurs garantis, et un versement de la différence par rapport aux prix mondiaux. Par exemple si le prix garanti du quintal de blé est de 20 euros et le prix mondial est de 12 euros, les agriculteurs vendent ce blé 20 euros le quintal et l’UE reverse les 8 euros par quintal de différence avec le marché mondial de telle sorte qu’il est exporté à 12 euros le quintal.

Les prix étaient très élevés afin de soutenir le revenu des agriculteurs ce qui avait pour conséquence une surproduction importante. Cette surproduction à son tour a pour conséquence une baisse des prix mondiaux. Les consommateurs extérieurs ont donc des prix bas, qui sont payés par les contribuables européens. Cette subvention aux consommateurs extérieurs est inefficace et ruine les producteurs du tiers monde. Et pour lutter contre la surproduction des quotas ont été mis en place… Avec les PECO, ce système aurait généré une surproduction encore plus importante. La PAC a été réformée, et désormais les prix garantis sont révisés peu à peu à la baisse, le soutien au revenu des agriculteurs se fait par des aides directes qui, de plus, devraient être distribuées par les pays. Ceci devrait permettre d’éviter une subvention des agriculteurs riches de la France par les autres pays européens. Ces aides directes sont basées sur les aides passées.

Les aides directes doivent être versées aux agriculteurs des PECO pour des raisons d’équité, mais elles risquent de subventionner des activités peu rentables et technologiquements peu performantes. Pour éviter ce problème et sûrement aussi pour transférer moins de revenu vers les PECO il a été décidé que les aides directes seront introduites progressivement.


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